FLASH APRAM 222 : Affaire Laguiole

Flash APRAM n° 222 – Limite des prérogatives des collectivités territoriales (communes)

Cour d’appel de Paris, 4 avril 2014, affaire LAGUIOLE 

Chers Amis,

Depuis notre dernière rencontre lors de la conférence APRAM / Universités, vous connaissez l’histoire du petit village d’irréductibles aveyronnais qui résiste encore et toujours non pas à l’envahisseur mais aux (prétendus) usurpateurs.

Contrairement aux aventures d’Astérix, l’histoire ne se termine pas bien pour le petit village. La Cour d’appel de Paris a débouté la petite commune de Laguiole de l’ensemble de ses demandes avant de la condamner à 52.000 EUR au titre de l’article 700 du code de procédure civile (qui s’ajoutent aux 50.000 EUR de la première instance) ce qui laisse présager une hausse des impôts locaux pour les 1.260 habitants de la commune.

Faits

Dans les faits, la commune de Laguiole reproche à un titulaire d’avoir déposé plusieurs marques LAGUIOLE et à plusieurs sociétés disséminées dans toute la France de les utiliser pour des produits et services de toute nature (allant des barbecues aux parfums), se rendant ainsi coupables de pratiques commerciales trompeuses susceptibles de porter atteinte à son nom, à son image et à sa renommée.

Les fondements juridiques sont nombreux. Citons la tromperie sur l’origine des produits (art. L.120-1 et L.121- 1 du code de la consommation), le parasitisme, la nullité relative des marques LAGUIOLE sur la base de l’atteinte au nom, à l’image ou à la renommée de la collectivité territoriale, la nullité absolue des marques LAGUIOLE pour défaut de distinctivité (LAGUIOLE évoquerait une provenance géographique), reprise d’une dénomination constitutive d’une indication de provenance, déceptivité et dépôt frauduleux ou encore la déchéance des marques LAGUIOLE pour usage trompeur et pour défaut d’exploitation sérieuse.

Bien loin d’entendre ces arguments, la Cour d’appel confirme le premier jugement et relève :

qu’il ressort de l’histoire de la ville « qu’il n’y a pas de vrais ou de faux Laguiole, il n’existe pas de vrais et de faux fabricants, des couteaux de qualité ou de valeur médiocre, des sites de production aussi bien à Laguiole depuis 1981, à Thiers que des sites étrangers, citons : l’Espagne, le Pakistan et la Chine » (p. 15) ;

– que la commune « ne peut valablement se prévaloir d’une atteinte à son nom, à son image et à sa renommée dès lors que sa réputation auprès du public tient à la fabrication, comme d’autres villes, d’un certain type de couteau dont le nom Laguiole est devenu usuel et générique et d’une AOC pour du fromage et non pour d’autres produits et services » ;

– que « la ‘grande notoriété, tant nationale qu’internationale’ qu’elle aurait acquise à une date non précisée, du fait de l’image rurale positive qu’elle véhicule auprès des consommateurs n’est, quant à elle que prétendue ; » (p. 24).

Bref commentaire

Nous ne savons pas s’il s’agit là du point final à cette histoire mais nul doute que le cumul des innovations de la Loi Hamon (qui crée les indications géographiques pour les produits industriels et artisanaux et ouvre la procédure d’opposition aux collectivités territoriales pour la défense de leur nom devant l’INPI) et de l’action à venir du législateur de l’Union européenne ouvriront de nouvelles perspectives aux collectivités territoriales.

Cliquez ici pour le texte complet de l’arrêt Laguiole de la Cour d’appel de Paris du 4 avril 2014.

Cliquez ici pour le texte complet de l’arrêt Laguiole de la Cour d’appel de Paris du 4 avril 2014 (suite).

Equipe FLASH

Tanguy de Haan ­– Marianne Schaffner – Agnès Hasselmann-Raguet – Stève Félix