Tribunal UE, 5 février 2015, T-78/13, Red Bull / OHMI – Sun Mark (BULLDOG), EU:T:2015:72
Chers Amis,
Voici un arrêt à propos de la ressemblance conceptuelle entre marques verbales en anglais dans l’Union européenne.
La société Red Bull possède la marque internationale verbale BULL ayant effet sur le territoire de l’Union européenne. Cette marque est enregistrée pour différentes boissons non alcoolisées, dont des boissons énergétiques.
Elle s’oppose à l’enregistrement de la marque communautaire verbale BULLDOG pour des produits identiques, au motif qu’il existe un risque de confusion au sens de l’article 8, § 1er, b, RMC.
La chambre de recours de l’OHMI estime que les marques ne peuvent être considérées comme globalement similaires en raison de leurs « différences conceptuelles importantes », ce qui exclut, selon elle, tout risque de confusion.
Saisi d’un recours formé par la société Red Bull, le Tribunal annule la décision de l’OHMI aux termes d’une nouvelle appréciation de la ressemblance entre les marques.
Visuellement, les marques BULL et BULLDOG présentent un degré moyen de similitude (et non faible, comme le décida l’OHMI).
Phonétiquement, les marques présentent également un degré moyen de similitude, car les marques ne sont pas seulement prononcées dans des lieux bruyants tels des bars et discothèques, mais également dans des grandes surfaces et commerces de détail (point 39 de l’arrêt).
Conceptuellement, le Tribunal juge qu’à propos de marques visant le territoire de l’Union européenne, le public pertinent n’est « dans sa grande majorité pas anglophone » (point 43). Le mot « bull » n’est pas considéré comme faisant partie du vocabulaire de base de l’anglais, qui serait compris par une large partie du grand public même non anglophone, « comme peut l’être, par exemple, le mot “water” » (point 45). Par conséquent, le fait que le terme « bull » ne puisse être revêtu d’une signification précise pour une large partie du public pertinent « rend vaine toute comparaison avec le signe verbal BULLDOG » et ce, nonobstant le fait que le mot anglais « bulldog » est passé de façon presque inchangée dans la quasi-totalité des langues officielles de l’Union européenne (point 47). Une comparaison conceptuelle n’est possible « que si les deux termes sont connus » de la personne devant y procéder. Or, le public non anglophone n’aura connaissance que de l’un de ces deux termes, « ce qui exclut toute incidence de la comparaison conceptuelle pour la majorité du public pertinent » (point 48).
Le Tribunal en conclut que les marques sont globalement similaires. Vu l’importance qu’il y a lieu d’attacher à l’identité des produits, « force est de juger que le risque de confusion entre les marques en cause est avéré » (point 60).
La décision de l’Office est annulée et celui-ci est condamné aux dépens.
Observation
Certains pourront s’étonner de la sévérité de la décision à propos d’un mot comme « bull », alors que la requérante a probablement contribué activement, grâce à la renommée de sa marque RED BULL, à faire comprendre ce mot, même auprès du public non anglophone.
Retenons simplement qu’au-delà de ce cas particulier, la majorité du public de l’Union n’a pas une connaissance de l’anglais qui dépasse celle de l’anglais de base.
D’autres arrêts du Tribunal relèvent cependant que l’anglais est bien implanté dans plusieurs pays européens. Tel est le cas pour les pays scandinaves, les Pays-Bas, Malte ou Chypre (TUE, T-307/09, EU:T:2010:509, Naturally Active, point 26 ; TUE, T-435/07, EU:T:2008:534, New Look, point 23).
Cliquez ici pour le texte complet de l’arrêt T-78/13 BULLDOG
Equipe Flash
Tanguy de Haan – Guillaume Marchais – Agnès Hasselmann-Raguet – Stève Felix