Cour de justice UE, 18 mai 2017, C-617/15, EU:C:2017:390, Hummel Holding / Nike
Chers Amis,
L’article 97 du règlement n° 207/2009 organise la compétence internationale des tribunaux des marques de l’Union européenne. Le principe veut qu’une action en contrefaçon d’une marque de l’Union européenne est portée dans l’Etat membre où est domicilié le défendeur. Si le défendeur n’est pas domicilié dans un Etat membre, il peut être assigné dans « l’Etat membre sur le territoire duquel il a un établissement » (art. 97, § 1er, RMUE). Si le défendeur n’a ni domicile, ni établissement dans un Etat membre, le demandeur peut alors assigner dans l’Etat où il a lui-même son domicile ou un établissement (art. 97, § 2, RMUE). A défaut, ce sera en Espagne, pays où siège l’EUIPO (art. 97, § 3, RMUE).
Si la compétence du tribunal des marques de l’Union européenne est fondée sur une de ces alternatives, l’étendue de la compétence est pan-européenne : le tribunal statuera sur « les faits de contrefaçon commis ou menaçant d’être commis sur le territoire de tout Etat membre » (art. 98, § 1er, RMUE).
La Cour de justice juge que la notion d’« établissement », au sens de l’article 97 RMUE, ne peut s’interpréter selon un droit national, mais est une notion de droit de l’Union qui requiert une interprétation autonome et uniforme (points 22 et 23).
Cette notion d’« établissement » s’interprète de manière « large » (points 34, 37 et 40). L’existence d’un « établissement » doit « aisément » pouvoir être reconnue. Il suffit d’« une forme de présence réelle et stable, à partir de laquelle une activité commerciale est exercée, et qui se manifeste d’une façon durable vers l’extérieur, comme le prolongement d’une maison mère » (points 37 et 41). Pour déterminer ce qu’est un établissement sur le territoire d’un Etat membre d’une maison mère établie en dehors de l’Union, les circonstances suivantes sont sans pertinence :
– le fait que l’établissement ait ou non la personnalité juridique (point 38) ;
– le fait d’être une filiale directe ou une sous-filiale de la maison mère (point 39) ; ou encore
– le fait que l’établissement ait ou non participé à la contrefaçon alléguée (point 40).
En l’espèce, la société danoise Hummel Holding était titulaire d’une marque figurative de l’Union européenne et reprochait à Nike de porter atteinte à ses droits exclusifs. Elle avait assigné en Allemagne la société américaine Nike Inc. au motif que celle-ci possédait un établissement en Allemagne, à savoir sa sous-filiale Nike Deutschland GmbH, mais laquelle n’était pas partie à la procédure (car il semble qu’elle n’était pas impliquée dans la vente des produits litigieux). La société néerlandaise Nike Retail B.V. fut assignée aux côtés de la société américaine, mais ceci est étranger à la question préjudicielle posée à propos de la notion d’établissement.
Commentaire
Une société mère établie en dehors de l’Union européenne est susceptible d’être assignée devant les tribunaux de différents Etats membres dès l’instant où elle possède, dans ces Etats, au moins un établissement qui a l’apparence d’être un prolongement opérationnel de la maison mère. Ceci n’est pas sans importance puisque le tribunal saisi aura une compétence pan-européenne.
Cliquez ici pour le texte complet de l’arrêt Hummel Holding / Nike, C-617/15, EU:C:2017:390
Equipe FLASH
Tanguy de Haan – Agnès Hasselmann-Raguet – Stève Félix – Guillaume Marchais