Cour de cassation, chambre commerciale, 17 janvier 2018, pourvoi n° H 15-29.276, Li Yu / Chen et Castel Frères
Chers Amis,
Voici une intéressante décision rendue par la Cour de cassation qui opère un revirement spectaculaire de jurisprudence, sur le point de savoir si l’usage d’une marque par un tiers aux seules fins de procéder à une exportation, sans autre usage en France, vers un pays où il dispose d’un droit de marque, procède ou non d’un motif légitime ne pouvant être sanctionné au titre de la contrefaçon.
Dans son arrêt du 10 juillet 2007 (n° 05-18571), la Cour de cassation avait retenu cette circonstance comme « ménageant une exception de motif légitime de détention de tels produits revêtus du signe litigieux sur le territoire français ».
Citant ce précédent arrêt, la Cour revient expressément sur cette solution dans l’arrêt commenté.
La société Castel Frères, bien connue dans le domaine de la production et de la commercialisation de vins et spiritueux dans le monde entier, est titulaire de marques françaises et européenne constituées de caractères chinois dont la translittération en français se lit « Ka Si Té », correspondant à la forme chinoise la plus proche de la marque CASTEL.
Deux particuliers, Monsieur Li Yu et Madame Chen, déposent le 25 février 2009 une marque française constituée d’un signe identique pour désigner des produits identiques, puis utilisent cette marque.
Castel les assigne en contrefaçon et obtient gain de cause devant les juges du fond.
Sur le principal point de la décision, la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence en faisant d’abord allusion à son arrêt du 10 juillet 2007, pour retenir que « toutefois, les directives de l’Union européenne instituent […] une harmonisation complète, en définissant le droit exclusif dont jouissent les titulaires de marques dans l’Union ».
Elle considère que « la solution retenue par l’arrêt précité ne fait donc pas une application correcte de ce principe d’harmonisation, puisque ni [la première directive 89/104/CEE sur les marques], ni celles adoptées par la suite, ne prévoient une telle exception, de sorte que le refus de constater la contrefaçon en pareil cas ne peut être maintenu ».
Et la Cour de retenir « qu’ayant constaté que la marque avait été apposée en France, territoire sur lequel elle était protégée, la cour d’appel en a exactement déduit, lors même que les produits ainsi marqués étaient destinés à l’exportation vers la Chine, que la contrefaçon était constituée ».
En d’autres termes, Castel vainc.
Cliquez ici pour le texte complet de l’arrêt
Equipe FLASH
Guillaume Marchais – Tanguy de Haan – Elodie Billaudeau – Stève Félix