Tribunal UE, 17 mai 2018, T-760/16, EU:T:2018:277, Basil BV / EUIPO – Artex SpA
Chers Amis,
Le Tribunal de l’Union européenne vient de rendre un intéressant arrêt en matière de dessins ou modèles communautaires.
La société Basil a déposé un modèle communautaire pour des « paniers spéciaux pour cycles ». A l’initiative de la société Artex, ce modèle a été annulé pour défaut de caractère individuel par l’EUIPO. Le nez dans le guidon, Basil porte l’affaire devant le Tribunal.
L’arrêt comporte notamment d’intéressants développements sur une question procédurale : la requérante invoquait en effet l’existence d’une décision antérieure d’une chambre de recours par laquelle une précédente demande en nullité introduite à l’encontre du dessin ou modèle contesté avait été rejetée.
Elle invoquait les dispositions de l’article 52, § 3, RDMC, mais le Tribunal répond à juste titre que cet article vise l’existence d’une décision précédente d’un tribunal des dessins ou modèles communautaire, c’est-à-dire « nécessairement d’une juridiction nationale d’un Etat membre », et non une décision administrative de l’EUIPO.
La requérante n’a pas non plus établi que les parties étaient strictement les mêmes.
Enfin, le Tribunal exclut une application par analogie de cet article aux hypothèses où l’EUIPO aurait déjà statué, car « il n’est pas établi que cette disposition comporterait une lacune incompatible avec un principe général du droit qui pourrait être comblé par une application par analogie » (point 30).
Une analogie avec la marque européenne, pour laquelle il existe une disposition expresse dans le droit de l’Union, est également écartée par le Tribunal au motif que le RDMC ne contient précisément pas de disposition expresse en ce sens.
Quant à l’absence de caractère individuel : mettant tous ses œufs dans le même panier, Basil conteste la pertinence des éléments retenus pour considérer que le modèle avait été divulgué avant son dépôt. Le Tribunal constate tout d’abord que Basil n’apporte aucun élément de nature à contester sérieusement les divulgations. S’inscrivant dans le cycle jurisprudentiel de ces dernières années relatif au fameux « test des quatre étapes », le Tribunal approuve le raisonnement de l’EUIPO constatant le défaut de caractère individuel du modèle contesté.
Selon le Tribunal, l’EUIPO a bien tenu compte de la nature du produit (ou secteur des produits concernés), a défini l’utilisateur averti des paniers pour cycles, tenant compte en particulier du degré de liberté du créateur, puis a comparé les modèles en cause.
Le Tribunal constate la définition correcte de l’utilisateur averti de tels produits (« une personne habituée aux paniers spéciaux pour cycles qui, sans être un concepteur ou un expert technique, connait les différents dessins ou modèles existant dans le secteur concerné et dispose d’un certain degré de connaissance quant aux éléments que ces dessins ou modèles comportent normalement », point 80). Et constate que la liberté du créateur dans l’élaboration de tels paniers est limitée par des contraintes techniques « mais que le créateur pouvait choisir entre une grande variété de couleurs, de matériaux ou de formes du panier » (point 81).
Après avoir relevé des concordances entre les paniers concernés dues à de nombreuses caractéristiques et constaté que les quelques différences de détail « ne dominaient pas l’image globale du panier spécial pour cycles et que l’utilisateur verrait donc dans les dessins ou modèles en conflit la même forme, le même matériau, les mêmes qualités esthétiques », le Tribunal a conclu que l’EUIPO a correctement retenu que les dessins ou modèles en conflit « produisaient la même impression globale sur l’utilisateur averti ».
Le recours est donc rejeté.
Commentaire
Cet arrêt s’inscrit dans la continuité de la jurisprudence dégagée ces dernières années sur la notion de caractère individuel, ainsi que sur les documents à prendre en considération en matière de divulgation. Malgré ses coups de pédales frénétiques, la requérante s’incline au terme des quatre étapes et est contrainte à l’abandon.
Cliquez ici pour le texte complet de l’arrêt
Equipe FLASH
Guillaume Marchais – Tanguy de Haan – Elodie Billaudeau – Stève Félix