Tribunal de l’Union européenne, 26 juin 2018, T‑71/17, EU:T:2018:381, France.com, Inc. / EUIPO – République française
Chers Amis,
En 2014, M. Jean-Noël Frydman, qui a ensuite cédé ses droits à la société américaine France.com, a demandé l’enregistrement de la marque complexe de l’UE « France.com » pour des services publicitaires, des services liés aux voyages et des services de publications en ligne (classes 35, 39 et 41).
La République française s’est opposée à cette demande sur la base de sa marque complexe de l’UE « France » de 2010 enregistrée en classes 9, 35 et 41.
Les décisions de l’EUIPO étant favorables à la France, la société France.com a formé un recours devant le TUE.
La requérante invoque plusieurs droits antérieurs, dont un nom de domaine « france.com » utilisé depuis plus de 21 ans, son nom commercial utilisé depuis 2002 en France, ainsi que des marques de l’UE semi-figuratives antérieures à celles détenues par la République française. Le TUE rappelle que, dans le cadre d’une procédure d’opposition, ces droits antérieurs ne sont pas plus pertinents que les décisions de juridictions nationales relatives à ces titres (point 37).
La société France.com prétend également qu’il n’y aurait aucun risque de confusion entre les marques. Le public pertinent retenu est celui de l’UE, il a un niveau d’attention moyen à élevé et est à la fois composé du grand public et de professionnels.
La distinctivité du terme « France » est remise en cause par la requérante. Elle reproche à la chambre de recours d’avoir considéré cet élément verbal comme l’élément principal dans les signes opposés. Le TUE considère au contraire que le terme « France » est tout aussi important que les autres éléments présents dans les signes (images stylisées de la Tour Eiffel par exemple) (point 50).
Le TUE confirme également que « France » est la dénomination abrégée de la République française (point 52). Il rappelle l’arrêt Monaco (T‑197/13, EU:T:2015:16, point 58) selon lequel une marque qui correspond à l’abrégé d’un Etat peut servir dans le commerce comme indication de provenance ou de destination géographique ou de lieu de prestations de services et donc, présenter un caractère descriptif. Le TUE reconnaît ainsi un caractère distinctif faible au terme « France ». Cela ne signifie pas pour autant que cet élément est négligeable (point 53). La position, la dimension de l’élément ou la présence d’éléments figuratifs peuvent le rendre dominant (point 54 et 55).
Le TUE procède ensuite à la comparaison des deux marques :
- Les signes en conflit, pris dans leur ensemble, ne sont que faiblement similaires sur le plan visuel (configuration et police différentes, représentation stylisée de la Tour Eiffel différente, hexagone et « .com » non présent dans la marque antérieure).
- Sur le plan phonétique, la requérante soutenait que sa marque serait lue par un anglophone comme « eiffel tower – france » et par un francophone comme « tour eiffel – france » du fait de la notoriété mondiale du monument. Le TUE rappelle que l’analyse phonétique d’une marque complexe ne prend en compte que les éléments verbaux, à l’exclusion des éléments figuratifs qui relèvent de la comparaison visuelle. Les marques sont ainsi considérées comme presque identiques sur le plan phonétique. L’abréviation « .com », faisant référence au site Internet, sera occultée par de nombreux consommateurs (point 76).
- Conceptuellement, le terme « France » fait référence à la République française tout comme la Tour Eiffel, l’hexagone et les couleurs bleu, blanc et rouge qui sont notoirement associées à cet Etat. L’élément verbal « .com » ne saurait modifier le sens véhiculé par l’élément verbal « France » et les autres éléments présents dans la marque demandée. Les signes sont donc conceptuellement identiques.
La société France.com ne conteste pas l’identité et la similarité des services en cause.
Compte tenu de ces derniers éléments et du degré particulièrement élevé de similitude sur les plans phonétique et conceptuel, l’existence d’un risque de confusion entre les signes est caractérisée. Le faible caractère distinctif de la marque antérieure n’est qu’un élément parmi d’autres et ne doit pas justifier à lui seul l’exclusion du risque de confusion (T‑134/06, EU:T:2007:387, PAGESJAUNES.COM, point 70) (point 97).
Le recours de la société France.com est rejeté.
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Equipe FLASH
Elodie Billaudeau – Tanguy de Haan – Guillaume Marchais – Stève Félix