Flash APRAM n° 338 – Marques de position : un arrêt peu pointilleux

Cour de justice UE, 6 juin 2019, C-223/18P, EU:C:2019:471, Deichmann SE / EUIPO – Munich SL

Chers Amis,

La Cour de justice de l’Union européenne vient de trancher la question de savoir si la qualification d’une marque en tant que marque « figurative » ou « de position » a une incidence quant à la preuve de l’usage sérieux que doit fournir son titulaire.

La société allemande Deichmann commercialise des chaussures de sport revêtues, sur leur flanc, d’une large croix. Elle se fait assigner par une société espagnole, Munich SL, titulaire d’une marque de l’Union européenne, enregistrée comme marque « figurative ». Celle-ci consiste en l’image stylisée d’une chaussure à lacets dessinée en pointillés avec deux bandes croisées sur le côté (cfr. lien ci-dessous). L’enregistrement de la marque n’est accompagné d’aucune description ni déclaration de renonciation.

Deichmann conteste que cette marque figurative enregistrée depuis plus de cinq ans a fait l’objet d’un usage sérieux. Elle soutient en particulier que les preuves d’usage que produit le titulaire espagnol témoignent peut-être d’un usage à titre de marque de position, mais pas en tant que marque figurative. Selon elle, les lignes en pointillés font partie intégrante de la marque en cause et on ne saurait considérer la marque autrement que comme une marque figurative.

A la demande du tribunal saisi qui surseoit à statuer quant à la validité de la marque en cause, la contestation est portée devant l’EUIPO. La chambre de recours, puis le Tribunal, donnent tort à Deichmann. Le type de marque est sans pertinence pour l’appréciation de l’usage sérieux. Le seul fait que la case « marque figurative » a été cochée lors de l’enregistrement ne saurait exclure que la protection porte sur la seule croix figurant en traits pleins, et non sur les pointillés dessinant le contour des chaussures.

La Cour de justice confirme cette analyse. « [L]e fait que la marque en cause a été enregistrée en tant que marque figurative n’importe pas en l’espèce aux fins de déterminer l’étendue de la demande de protection » (point 47). La question de savoir si la marque en cause doit être regardée comme une marque de position ou une marque figurative est « sans pertinence » (point 41). Ce qui importe, c’est que la représentation du signe soit suffisamment claire, précise, complète et intelligible. Or, en l’espèce, la protection sollicitée visait uniquement une croix, et les pointillés sont compris comme permettant de préciser l’emplacement de cette croix sur la chaussure.

Observation

A l’époque du dépôt de la marque (en 2002), les directives de l’EUIPO exigeaient qu’une marque de position soit expressément décrite en tant que telle. Ceci est sans pertinence aux yeux de la Cour, puisque les directives de l’EUIPO « ne constituent pas des actes juridiques contraignants pour l’interprétation des dispositions du droit de l’Union » (point 49).

On observera que, depuis le 1er octobre 2017, l’article 3, § 3, d, du règlement d’exécution (UE) 2017/1431 impose qu’une « marque de position » soit « représentée par la soumission d’une reproduction identifiant dûment la position de la marque et sa taille ou proportion par rapport aux produits concernés. Les éléments ne faisant pas l’objet de l’enregistrement sont visuellement ignorés, de préférence par la présence de lignes discontinues ou pointillées. La représentation peut être accompagnée d’une description détaillant la façon dont le signe est apposé sur les produits ».

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Equipe FLASH

Tanguy de Haan – Guillaume Marchais – Stève Félix – Elodie Billaudeau

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