CJUE, 18 décembre 2019, C‑666/18, EU:C:2019:1099, IT Development SAS / Free Mobile SAS
Chers Amis,
IT Development a conclu avec Free Mobile un contrat de licence sur un progiciel de gestion de projet. Cinq ans après, IT Development agit contre Free Mobile et l’accuse d’avoir modifié le logiciel, notamment en créant de nouveaux formulaires. Outre le caractère selon elle substantiel de ces modifications, elle prétend que Free Mobile n’avait pas le droit de procéder à de telles modifications selon les stipulations du contrat de licence.
Le 6 janvier 2017, le Tribunal de grande instance de Paris a déclaré irrecevables les prétentions d’IT Development fondées sur la responsabilité délictuelle de Free Mobile. Il considéra « qu’il existait deux régimes distincts de responsabilité en matière de propriété intellectuelle, l’un délictuel en cas d’atteinte aux droits d’exploitation de l’auteur du logiciel, tels que désignés par la loi, l’autre contractuel en cas d’atteinte à un droit de l’auteur réservé par contrat, et que, en l’espèce, il était clairement reproché à Free Mobile des manquements à ses obligations contractuelles, relevant d’une action en responsabilité contractuelle, et non pas des faits délictuels de contrefaçon de logiciel. » (point 20)
IT Development interjette appel devant la cour d’appel de Paris qui décide finalement de surseoir à statuer et de demander à la CJUE si le régime de la contrefaçon, relevant de l’application du droit spécial de la propriété intellectuelle doit s’appliquer ou si elle doit privilégier l’application du régime de droit commun de la responsabilité contractuelle.
La CJUE rappelle que s’agissant « des droits matériels des auteurs de programmes d’ordinateur, il y a lieu de relever que les États membres sont tenus, en vertu de l’article 1er de [la directive 2009/24], de protéger les programmes d’ordinateur par le droit d’auteur en tant qu’œuvres littéraires. » (point 32)
Puis la Cour juge que les directives 2004/48 [relative au respect des droits intellectuels]et 2009/24 [concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur] « doivent être interprétées en ce sens que la violation d’une clause d’un contrat de licence d’un programme d’ordinateur, portant sur des droits de propriété intellectuelle du titulaire des droits d’auteur de ce programme, relève de la notion d’“atteinte aux droits de propriété intellectuelle” » (point 49). Par conséquent, IT Development doit pouvoir bénéficier des garanties prévues par le régime de protection de la propriété intellectuelle, « indépendamment du régime de responsabilité applicable selon le droit national » (point 49).
En somme : Lex specialis derogat legi generali.
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Equipe FLASH
Elodie Billaudeau – Stève Félix – Tanguy de Haan – Guillaume Marchais