Cour de Justice de l’UE, 28 octobre 2021, C-123/20, EU:C:2021:889, Ferrari SpA / Mansory Design & Holding GmbH – WH
Chers Amis,
La Cour de justice vient de rendre un arrêt expliquant dans quelles conditions l’apparence d’une partie de produit peut bénéficier d’une protection en qualité de dessin ou modèle communautaire non enregistré.
En l’espèce, Ferrari a divulgué dans un communiqué de presse du 2 décembre 2014 son modèle haut de gamme FXX K, produit en nombre très limité, et destiné exclusivement à une conduite sur circuit. Ce communiqué comportait deux photographies, montrant une vue latérale et une vue frontale de la voiture. Sur le capot de la voiture figure un grand « V » de couleur noire.
La société allemande Mansory Design produit et commercialise des ensembles d’accessoires de personnalisation de voitures haut de gamme, appelés, plus vulgairement, « kits de tuning ».
Ferrari a assigné Mansory Design en contrefaçon de dessin ou modèle non enregistré, car Mansory Design commercialisait des « kits de tuning » destinés à modifier l’apparence de la Ferrari 488 GTB, un modèle de route produit en série, de manière à la rapprocher de la Ferrari FXX K, en particulier par l’apposition du grand « V » noir sur le capot.
Après une procédure infructueuse devant les juridictions inférieures allemandes, Ferrari a saisi le Bundesgerichtshof, qui interroge la Cour de justice quant à savoir si la divulgation au public d’images d’un produit (p. ex. une voiture) peut entraîner la divulgation d’un dessin ou modèle sur une partie ou une pièce de ce produit. Si oui, dans quelle mesure l’apparence d’une partie du produit ou d’une pièce de ce produit complexe doit être autonome par rapport à l’ensemble pour pouvoir en apprécier le caractère individuel ?
La Cour répond lui donne les éléments suivants de réponse :
- L’apparence constitue l’élément déterminant d’un dessin ou modèle (point 30).
- Le dessin ou modèle communautaire non enregistré naît à compter de la date à laquelle il est divulgué au public pour la première fois au sein de l’Union (point 37). Il y a divulgation dès que des représentations du dessin ou modèles ont été diffusées auprès de commerçants opérant dans le secteur concerné (point 37).
- Il n’y a pas d’obligation pour les créateurs de faire une divulgation distincte de chacune des parties de leurs produits pour lesquels ils souhaitent bénéficier d’une protection de dessin ou modèle communautaire non enregistré (point 43).
- Lors de la divulgation aux milieux spécialisés, le dessin ou modèle de la partie du produit doit toutefois être « clairement identifiable » (point 44). Les caractéristiques de la partie ou de la pièce de ce produit doivent être « clairement visibles » (point 44).
- Pour pouvoir examiner si l’apparence d’une partie ou d’une pièce possède un caractère individuel, il est nécessaire que la partie ou pièce en cause « constitue une section visible du produit ou du produit complexe, bien délimitée par des lignes, des contours, des couleurs, des formes ou une texture particulière » (point 52). Cela suppose que l’apparence de la partie de produit ou de la pièce d’un produit complexe « soit capable, par elle-même, de produire une impression globale et ne puisse pas se fondre complètement dans le produit d’ensemble » (point 50).
Nourri par ces enseignements, le juge national devra, à présent, apprécier si le grand « V » noir de Ferrari est digne de protection et, dans l’affirmative, apprécier si les droits ont été violés.
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Equipe FLASH
Tanguy de Haan – Guillaume Marchais –Stève Félix – Charlotte Myers