Flash APRAM n° 409 – Reconditionnement de médicaments

Cour de justice de l’UE, 17 novembre 2022, C‑147/20, EU:C:2022:891, Novartis Pharma GmbH [« Novartis »] / Abacus Medicine A/S ; C‑204/20, EU:C:2022:892, Bayer Intellectual Property GmbH [« Bayer »] / kohlpharma GmbH ; C‑224/20, EU:C:2022:893, Merck Sharp & Dohme [« MSD »] / Abacus Medicine A/S e.a.

Chers Amis,

La Cour de justice a rendu trois longs arrêts en matière de reconditionnement de médicaments revêtus de la marque en cas d’importation parallèle. Ces affaires n’ont pas été jointes, mais l’avocat général Szpunar avait pris, en janvier 2022, des conclusions communes aux trois affaires (EU:C:2022:28).

On retiendra que les conditions dans lesquelles un titulaire peut s’opposer à la commercialisation d’un médicament reconditionné portant sa marque restent celles énoncées dans le fameux arrêt Bristol-Myers Squibb e.a. (C‑427/93, C‑429/93 et C‑436/93, EU:C:1996:282) du 11 juillet 1996, et répétées dans les arrêts Boehringer Ingelheim (C‑348/04, EU:C:2007:249) et Junek Europ-Vertrieb (C‑642/16, EU:C:2018:322).

Il s’agit d’une matière harmonisée au niveau de l’Union. Un Etat membre ne peut donc pas adopter ses propres règles, telle l’obligation que les médicaments importés parallèlement soient, en principe, reconditionnés dans un nouvel emballage et que le recours au ré‑étiquetage ainsi qu’à l’apposition de nouveaux dispositifs de sécurité reste exceptionnel comme, par exemple, en cas de rupture d’approvisionnement (MSD, point 100).

Les arrêts Novartis, Bayer et MSD apportent notamment un éclairage sur les points suivants.

  1. D’un point de vue réglementaire, le reconditionnement dans un nouvel emballage et le ré-étiquetage de médicaments importés parallèlement constituent des formes de reconditionnement équivalentes en ce qui concerne l’efficacité des dispositifs de sécurité visés par la directive 2001/83 sur les médicaments, sans que l’une ne prévale sur l’autre (Bayer, point 52).
  1. Cependant, en droit des marques, un reconditionnement dans un nouvel emballage constitue une « ingérence plus profonde » dans les prérogatives du titulaire de la marque que la commercialisation du produit dans son emballage d’origine ré-étiqueté (Novartis, point 54 ; Bayer, point 65 ; MSD, point 56). Le titulaire d’une marque est en droit de s’opposer à la commercialisation, par un importateur parallèle, d’un médicament reconditionné dans un nouvel emballage extérieur sur lequel est apposée la marque lorsqu’il est objectivement possible de procéder au ré-étiquetage du médicament et que le médicament pourrait ainsi effectivement accéder au marché de l’Etat membre d’importation (Bayer, point 68).
  1. Un importateur parallèle est autorisé, lors du reconditionnement du médicament, à remplacer le dispositif antieffraction par un nouveau dispositif équivalent, même si cela laisse d’éventuelles traces visibles d’ouverture sur l’emballage d’origine (Novartis, points 67-68), ou si ces traces sont perceptibles au toucher (MSD, point 79). S’il ne fait aucun doute, dans l’esprit des consommateurs, que les traces d’ouverture de l’emballage extérieur sont imputables au reconditionnement fait par l’importateur parallèle, la garantie de provenance du médicament reste assurée (Bayer, point 81 ; MSD, point 74). Un titulaire est en droit de s’opposer à la commercialisation du médicament reconditionné lorsque le remplacement du dispositif antieffraction a laissé des traces d’ouverture, pour autant :
  • qu’il ne fasse aucun doute que ces traces d’ouverture sont imputables au reconditionnement fait par l’importateur parallèle ; et
  • que ces traces ne provoquent pas, sur le marché d’importation, « une résistance si forte d’une proportion significative de consommateurs à l’égard de médicaments ainsi reconditionnés qu’elle constituerait une entrave à l’accès effectif à ce marché », ce qui doit être vérifié au cas par cas

(MSD, point 79 ; Novartis, point 74 ; Bayer, point 86).

  1. Le code à barres comportant l’identifiant unique du médicament peut être apposé sur l’emballage extérieur au moyen d’une étiquette autocollante, pour autant qu’elle ne puisse pas être retirée sans être endommagée, et que le code à barres reste parfaitement lisible pendant une durée minimale d’un an après la date de péremption du médicament (Novartis, point 90).
  1. Il arrive que l’importateur parallèle reconditionne le médicament dans un nouvel emballage extérieur sur lequel il réappose la marque du titulaire, spécifique à ce produit, mais pas les autres marques et/ou les autres signes distinctifs qui figuraient sur l’emballage extérieur d’origine. Le titulaire de la marque peut s’y opposer lorsque la présentation de ce nouvel emballage extérieur est effectivement de nature à nuire à la réputation de la marque ou ne permet pas ou seulement difficilement au consommateur de savoir si le médicament provient du titulaire ou d’une entreprise économiquement liée à celui-ci ou, au contraire, d’un tiers, portant ainsi atteinte à la fonction d’indication d’origine de la marque (MSD, point 130). A nouveau, ceci devra être vérifié au cas par cas.

Cliquez ici pour le texte complet de l’arrêt Novartis (C‑147/20)

Cliquez ici pour le texte complet de l’arrêt Bayer (C‑204/20)

Cliquez ici pour le texte complet de l’arrêt MSD (C‑224/20)

Equipe FLASH

Tanguy de Haan – Guillaume Marchais – Stève Félix – Benjamin Mouche

Documents associés