Tribunal de l’UE, 18 janvier 2023, T‑758/21, EU:T:2023:3, Dorsum Informatikai Fejlesztő és Szolgáltató Zrt / EUIPO – id Quantique SA (CLAVIS)
Tribunal de l’UE, 1er février 2023, T‑349/22, EU:T:2023:31, Hacker-Pschorr Bräu GmbH / EUIPO – Jana Vandělíková (HACKER SPACE)
Chers Amis,
En ce début d’année, le Tribunal de l’Union européenne a rendu deux arrêts soulignant le soin qu’il convient d’apporter aux oppositions formées auprès de l’EUIPO, en particulier quant à l’indication de la marque antérieure et quant aux motifs fondant une opposition.
Si certains peuvent avoir l’impression que l’EUIPO accorde systématiquement un délai pour régulariser une situation ou interprète nécessairement l’intention des parties avant de décider, la réalité de la pratique de l’Office est tout autre. L’opposant doit être attentif et rigoureux juridiquement pour ne pas voir son action rejetée purement et simplement.
Dans la première affaire (CLAVIS), la requérante avait indiqué une date et un numéro erronés (identiques à ceux du dépôt contesté …). Les données correctes de la marque antérieure n’avaient été fournies qu’après l’expiration du délai d’opposition.
Si plusieurs éléments permettaient de relever l’erreur (délais de priorité correct et beaucoup plus ancien, référence du dossier), le Tribunal rappelle que l’article 5 du règlement délégué 2018/625 contient une distinction entre deux catégories de conditions de recevabilité.
Si l’acte d’opposition ne remplit pas les conditions de recevabilité visées par l’article 5, § 3, du règlement, l’opposition est rejetée pour irrecevabilité à moins qu’il ne soit remédié aux irrégularités constatées avant l’expiration du délai de l’opposition. Sont notamment concernés le numéro de dépôt attribué et le nom du titulaire de la demande contre laquelle l’opposition est formée ainsi qu’une identification claire de la marque ou du droit antérieur sur lequel l’opposition se fonde (lorsque l’opposition se fonde sur l’existence d’une marque antérieure, le numéro de dossier ou le numéro d’enregistrement).
En revanche, si l’acte d’opposition ne satisfait pas aux dispositions de l’article 2, § 2, d à h, du règlement, l’article 5, § 5, prévoit que l’opposition n’est rejetée pour irrecevabilité que lorsque l’opposant, après avoir été invité par l’EUIPO à remédier aux irrégularités constatées dans un délai de deux mois, n’a pas corrigé lesdites irrégularités dans le délai imparti.
En l’espèce, l’acte d’opposition soumis par la requérante n’a pas satisfait à l’une des conditions de recevabilité de l’opposition prévue à l’article 5, § 3, du règlement 2018/625, de sorte que l’EUIPO n’était pas tenu de l’inviter à y remédier avant de rejeter l’opposition comme irrecevable.
Dans la seconde affaire (HACKER SPACE), l’opposant avait formé opposition sur la base de quatre marques antérieures et coché comme motif d’opposition la case « Article 8, paragraphe 1er, sous a), du [règlement (UE) 2017/1001] – « La marque contestée est identique à la marque antérieure et couvre des produits et/ou services identiques ».
En revanche, la requérante n’a pas coché la case « Article 8, paragraphe 1er, sous b) » en omettant ainsi d’invoquer l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public. Or, si les marques antérieures reprenaient bien un élément du signe de la demande contestée, ces dernières n’étaient pas identiques. Dans ses observations ultérieures, la requérante a cependant développé toute une argumentation pour démontrer l’existence d’un risque de confusion. L’Office a écarté toute cette argumentation en se tenant rigoureusement au seul motif visé par le formulaire introduisant l’opposition.
Sur recours, le Tribunal valide l’approche formaliste de l’Office. Celui-ci n’avait pas à se substituer à l’opposant en corrigeant sa demande sur la base d’une interprétation de son intention réelle et rappelle qu’« à l’expiration du délai d’opposition, la portée du recours devait être considérée comme étant figée, de sorte que les éléments fournis postérieurement ne pouvaient pas avoir pour objet de modifier la portée du recours, au risque, en particulier, de méconnaître l’effet utile des délais impératifs et, partant, le principe d’égalité de traitement » (point 37).
Commentaire
L’opposition à un dépôt de marque devant un Office est un acte juridique à part entière et la maitrise de l’exercice n’est pas évidente. Si la réalisation de l’acte passe par un simple formulaire à remplir en cas d’opposition formelle, le plus grand soin devra lui être apporté pour éviter de colorer son dossier d’un teinte d’amateurisme, qui risque de perdurer jusqu’à ce qu’une procédure en nullité soit initiée … devant le même Office.
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Equipe FLASH
Stève Félix – Tanguy de Haan – Guillaume Marchais – Benjamin Mouche