Flash APRAM n° 415 – Sanction financière d’une rupture abusive d’un contrat de licence

Tribunal de commerce de Paris, 31 janvier 2023, Bragard Inc. et M. B. Liebermann-Bragard / Bragard SAS

Chers Amis,

Le Tribunal de commerce de Paris a récemment eu à se prononcer sur les conséquences d’une rupture d’un contrat de licence de marque de vêtements entre un concédant français et un licencié américain. Le contrat est soumis au droit français et court jusque fin 2028.

En 2012, le licencié, anciennement filiale du concédant, se voit octroyer une licence exclusive de marque pour le territoire américain.

En 2021, alors que les effets de crise du covid-19 sont encore perceptibles, le concédant met fin à l’exclusivité de la licence pour non-atteinte des seuils contractuellement prévus. Peu après, alors que le licencié parvient à atteindre ses objectifs, il doit faire face à une procédure d’audit, à laquelle il s’oppose. Face à cette situation, le concédant, qui avait déjà plusieurs griefs vis-à-vis de son licencié quant à l’exécution du contrat (présentation des produits sur Internet, contrôle de qualité des vêtements), lui adresse un courrier de résiliation en mai 2022.

En août 2022, le licencié saisit le tribunal de commerce. Au terme d’un jugement détaillé, la juridiction qualifie la rupture contractuelle d’abusive au motif qu’aucun des griefs motivant la résiliation par le concédant n’était fondé. Le concédant est même condamné à payer au licencié 8,7 millions d’euros au titre de dommages et intérêts.

Commentaire

Nous apprenons que cette décision est frappée d’appel et un référé-suspension est en cours.

En dépit des tensions existant souvent dans de telles situations, la partie souhaitant mettre fin à un contrat de licence doit soigneusement identifier les actes fautifs de son co-contractant et réunir les éléments de preuve y afférent préalablement à l’envoi d’un courrier de résiliation. Cela est d’autant plus indiqué que le risque financier résultant du caractère abusif d’une rupture contractuelle peut être significatif, notamment lorsque son co-contractant est en mesure de produire au débat un rapport d’expertise permettant d’établir son gain manqué et sa perte de chances pour un terme contractuel éloigné.

Cette affaire rappelle l’importance pour le co-contractant s’estimant lésé par la rupture contractuelle de faire appel à un expert reconnu et indépendant pour présenter au juge des données économiques précises et chiffrées (marges, chiffre d’affaires…) sur une période de référence pertinente lui permettant ainsi de chiffrer le gain manqué et la perte de chances.

Cliquez ici pour le texte complet du jugement.

Equipe FLASH

Benjamin Mouche – Stève Félix – Tanguy de Haan – Guillaume Marchais

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