Cour de justice de l’UE, 2 mars 2023, C-684/21, EU:C:2023:141, Papierfabriek Doetinchem BV / Sprick GmbH Bielefelder Papier- und Wellpappenwerk & Co.
Chers Amis,
La société allemande Sprick est titulaire de plusieurs dessins ou modèles communautaires pour des distributeurs de papier d’emballage, dont l’enregistrement suivant :
Elle assigne la société néerlandaise Papierfabriek Doetinchem en contrefaçon devant les juridictions allemandes, mais celle-ci se défend en soutenant, à titre reconventionnel, que le dessin ou modèle est nul, au motif que toutes ses caractéristiques sont imposées uniquement par la fonction technique du produit concerné (art. 8, § 1er, RDMC).
Le dessin ou modèle est jugé valable par le Landgericht Düsseldorf, mais annulé en appel par l’Oberlandesgericht. Le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) annule toutefois l’arrêt d’appel. A la suite du renvoi de l’affaire devant l’Oberlandesgericht Düsseldorf, cette juridiction doute des critères utilisés par le Bundesgerichtshof et se décide à interroger (enfin, penseront certains) la Cour de justice de l’Union.
Premièrement, elle lui demande quels critères appliquer pour savoir si des caractéristiques de l’apparence d’un produit sont exclusivement imposées par la fonction technique du produit.
La Cour de justice reprend son important arrêt DOCERAM de 2018 (Flash APRAM n° 309) et répond que « l’existence de dessins ou modèles alternatifs n’est pas déterminante pour l’application [de l’article 8, § 1er, RDMC]. Il en va de même lorsqu’il s’agit de multiples dessins ou modèles alternatifs enregistrés par le titulaire du dessin ou modèle concerné » (point 21). Selon la Cour, l’appréciation des caractéristiques « doit être effectuée au regard de l’ensemble des circonstances objectives pertinentes du cas d’espèce, notamment de celles dirigeant le choix de ces caractéristiques, de l’existence de dessins ou modèles alternatifs permettant de réaliser cette fonction technique et du fait que le titulaire du dessin ou modèle concerné est également titulaire d’enregistrements pour un grand nombre de dessins ou modèles alternatifs, ce dernier fait n’étant toutefois pas déterminant aux fins de l’application de cette disposition » (point 23).
Deuxièmement, la question est posée de savoir si, dans le cadre de l’application de l’article 8, § 1er, RDMC, il y a lieu de tenir compte du fait que la conception du produit permet une polychromie, alors que cette polychromie ne ressort pas en tant que telle de l’enregistrement.
La Cour répond que non. L’exigence de représentation graphique du modèle a pour fonction notamment de « définir le dessin ou modèle lui-même afin de déterminer l’objet exact de la protection conférée » (point 30). Dès lors, « le fait que la conception d[u] produit permet une polychromie ne saurait être pris en compte lorsque cette dernière ne ressort pas de l’enregistrement du dessin ou modèle concerné » (point 32). C’est une question de « sécurité juridique » (point 31).
Cliquez ici pour le texte complet de l’arrêt Sprick
Cliquez ici pour le Flash APRAM n° 309 à propos de l’arrêt DOCERAM
Equipe FLASH
Tanguy de Haan – Guillaume Marchais – Stève Félix – Benjamin Mouche