Flash APRAM n° 423 – Classification et responsabilité du déposant

Tribunal de l’UE, 26 avril 2023, T-794/21, EU:T:2023:211, Wenz Kunstoff GmbH & Co. KG / EUIPO – Mouldpro ApS (MOULDPRO)

Chers Amis,

Une société allemande Wenz dépose une demande d’enregistrement de la marque MOULDPRO pour les produits suivants :

  • classe 7 : « accouplements pour fermeture rapide de tuyaux ; accouplements de raccordement de tuyaux » :
  • classe 17 : « accouplements pour tuyaux en matières plastiques (compris dans la classe 17), tuyaux ».

L’EUIPO lui demande de reclasser les produits de la classe 7 dans la classe 17. Wenz obtempère sans broncher et regroupe ainsi tous les produits au sein de la seule classe 17. La marque est ensuite enregistrée.

Plus de cinq ans plus tard, la société danoise Mouldpro attaque la marque en déchéance. Elle prétend qu’un usage sérieux n’en a pas été fait, car Wenz n’a fait un usage de sa marque que pour des produits métalliques (relevant, en principe, de la classe 6) et non en plastique que sont les produits relevant de la classe 17.

L’EUIPO accueille la demande en déchéance en confirmant que la marque n’est effectivement pas enregistrée pour des produits métalliques puisqu’elle est enregistrée en classe 17 seulement.

Saisi d’un recours contre la décision de l’EUIPO, le Tribunal confirme, lui aussi, la déchéance.

Le Tribunal juge que « l’enregistrement de la marque contestée doit être compris à la lumière de la classification de Nice » et, plus particulièrement de l’édition en vigueur au moment du dépôt de la demande d’enregistrement (point 22). S’il est vrai que la classification de Nice n’a qu’un caractère administratif, « il y a toutefois lieu d’y recourir pour déterminer, si besoin est, la portée, voire la signification, des produits pour lesquels une marque a été enregistrée. En effet, en particulier lorsque le libellé des produits pour lesquels une marque est enregistrée est d’une généralité telle qu’il peut couvrir des produits très différents, il ne saurait être exclu de prendre en compte, à des fins d’interprétation ou en tant qu’indice de précision s’agissant de la désignation des produits, les classes que le demandeur d’une marque a choisies dans ladite classification » (point 23).

Ainsi, « les produits visés par la marque contestée doivent être interprétés d’un point de vue systématique, au regard de la logique et du système inhérent à la classification de Nice, tout en tenant compte des descriptifs et des notes explicatives, lesquels sont pertinents aux fins de déterminer la nature et la destination des produits en cause » (point 25).

C’est donc à bon droit que, dans le cadre de l’action en déchéance, l’EUIPO a interprété la signification des produits en cause « au regard de la classe dans laquelle ils étaient classés » (point 28).

En l’espèce, les produits de la classe 17 n’englobent que des produits non métalliques. Les produits qui sont classés dans cette classe particulière le sont « en raison de la matière dans laquelle ils sont fabriqués » (point 35). Si le titulaire se limite à faire usage de sa marque pour des produits métalliques, il n’en fait pas un usage sérieux pour les produits pour lesquels la marque est enregistrée en classe 17.

Quant au fait que ce soit l’EUIPO lui-même qui, lors de l’examen initial, a demandé de regrouper tous les produits au sein de la classe 17, le Tribunal juge que cet argument est « sans pertinence » (point 52). Seul le registre fait foi à l’égard des tiers, et non les intentions subjectives d’un déposant. C’est lui seul qui porte la responsabilité de ce qu’il demande (point 58). S’il n’était pas d’accord avec la suggestion de reclassement, il lui appartenait de s’y opposer. « Dès lors, [Wenz] ayant pris elle-même la décision de procéder au reclassement tel qu’il avait été proposé par l’EUIPO, elle ne saurait reprocher à ce dernier d’avoir limité la protection de la marque contestée aux produits de la classe 17 sans son consentement » (point 56).

Commentaire

Cette affaire illustre toute l’importance de la classification, surtout pour des produits qui sortent peut-être du quotidien des biens de grande consommation. Un soin particulier est requis dans l’analyse de ce qui est demandé, car la classification emporte des effets juridiques considérables !

Par ailleurs, il ne faut pas – et jamais – se fier aveuglément à ce que propose l’Office, puisque c’est le demandeur qui endosse, seul, la responsabilité de ce qu’il demande. S’il n’est pas d’accord, il doit contester les positions de l’Office, voire exercer les voies de recours qu’offre le RMUE.

Cliquez ici pour le texte complet de l’arrêt Mouldpro

Equipe FLASH

Tanguy de Haan – Guillaume Marchais – Stève Félix – Benjamin Mouche

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